Avec ce troisième roman, on retrouve
l'univers de Chuck Palahniuk, l'auteur de "Survivant, Choke" et
le trop incompris "Fight club". Les gimmicks langagiers, les personnages
décalés et les révélations surprenantes.
Pourtant, annonçons d'emblée la "recette" cette
fois fonctionne moins bien. La principale raison semble être une politique
d'édition française un peu anachronique. En effet, "Monstre
invisible" s'avère être le troisième roman d'une
série pour l'instant de quatre, mais sorti en France en 2003 alors
que le livre date de 1999. C'est pourquoi, l'univers du mannequinant semble
un peu dépassé, le rôle transgressif des transsexuels
nettement atténués, car trop galvaudé par les médias.
Puis abandonnés par, ces derniers, pour une merveilleuse télé
réalité. Alors que, pour autant, la vision de Chuck demeure
pertinente par son éclairage jusqu'auboutisme. Posons les limites,
le plus loin possible et franchissons-les avec éclat.
Aussi, pour une fois, le récit est moins dense que les précédents
livres. Les protagonistes trop attachés à leurs formes en
oublient le fond. Ils sont creux. L'intrigue distendue dans ce road-movie
sans but bousille les révélations. Pourtant bien tordues.
Cette petite baisse de forme de Chuck Palahniuk n'obvie pas la qualité
de ses autres romans. Si celui-ci n'est pas la meilleure façon d'aborder
cet auteur, il permet à son public d'attendre la prochaine parution
qui offrira un meilleur détournement de la réalité.
Et pour ceux qui ne connaissent pas encore l'écrivain de découvrir
ses précédents opus comme l'excellent "Choke". Quatrième
et dernier roman, si j'ai bien compris la logique des gars de chez Gallimard.
Chuck Palahniuk. A l'estomac. 2006. Dénoel et d'ailleurs.

Avec une grande capacité d'abstraction, n'importe qui doit être capable de trouver ce livre génial. Pour les plus radicaux munissez-vous d'une bonne paire de ciseaux. Allez-y virez moi ce roman qui alourdit l'ensemble. Chacun des chapitres lourdauds. Au pire lisez-le d'un oeil distrait. Ce que vous y verrez, rien qu'un auteur s'auto-parodiant. Ce fameux Chuck Palahniuk qui s'enlise dans ce qu’il sait déjà faire, sans chercher à ne dépasser aucune limite.
Pour résumer ce qui tient lieu d'histoire. Le pitch. Un groupe de personnes va s'enfermer dans un ancien théâtre pour concevoir l'œuvre de leur vie. Puis, le tout vire dans le stage de survie en milieu hostile. Vague dénonciation de la télé réalité.
Les personnages sans consistance vagissent, chouinent, se mutilent et meurent. Sans que personne, et surtout pas le lecteur, s'en émeuvent. Bizarrement on a envie de dire que pour un livre, les effets spéciaux sont franchement ratés. Le sang c'est du ketchup. Les doigts coupés de la patte d'amande. Le reste se contente d'un budget de série B, les acteurs, mal payés, surjouent leur rôle. Les décors sont en cartons pâtes.
Pour du Chuck, qui a nous habitué au lyrisme, au foisonnement, à l'excès jusqu'à l'outrance, signer là, un récit aussi linéaire, simpliste, c'est juste triste.
Pour autant, l'ouvrage ne se contente pas de cette mièvre histoire. Il s'agit d'un fin fil rouge qui relit entre elles des nouvelles.
Car le cœur de l'œuvre se situe là, dans les nouvelles. Chuck renoue avec l'originalité de son écriture particulière, si dynamique. La singularité des situations. Une géographie humaine de l'inconscient. Un truc brutal, vif et viscéral. Toutes les nouvelles n'ont pas la même puissance, mais aucune ne cherche le facile, le complaisant.
Voilà, il faut avoir un grand sens de l'abstraction. Juste pouvoir considérer ce bouquin uniquement comme un recueil de nouvelles. Point barre.
Manu

Chuck Palahniuk, Peste, Dénoel
et D’ailleurs, 2007
Pourquoi s'acharner à synthétiser un bouquin de Chuck,
vu le foisonnement du récit, la multiplicité des idées,
l'abondance de thèmes abordés. Pour autant, l'auteur à
la page trois de son histoire s'amuse à se lancer dans un résumé
de ce qui va se passer en répondant à la question de comment
il est en arrivé là. "Déjà il faut
s'évader d'un asile, il faut traverser le pays en stop, vêtu
de chausson en plastique et d'une combinaison en papier fermée
dans le dos, et qui s'ouvre tout le temps. Il faut arriver une demie
seconde trop tard pour empêcher un pédophile récidiviste
de violer votre femme. Et votre mère. Résultat du viol,
il faut élever un fils qui collectionne des charretées
de vieilles dents jaunies. Après, le collège, le gamin
partira. Pour rejoindre une espèce de secte qui ne vit que la
nuit. Il bousillera cinquante fois sa voiture et traînera avec
une espèce de prostitué pas vraiment prostitué.
Ce genre." Voilà à ce qui faut s'attendre, a de l'imprévu,
du jamais vu, lu. La biographie orale
de Buster Casey, alias Rant. De la petite enfance tumultueuse, d'un
gamin qui choppe volontairement la rage, trafique les dents de lait
de ses camarades contre des pièces d'or, tue sa grand-mère,
etc. L'âge adulte promet autant de surprises.
L'autre particularité de ce roman, c'est son mode narratif. Il
se compose de petits paragraphes très courts, autant de témoignages
des personnes qui ont croisées Rant. Les points de vues se complètent,
parfois s'opposent, pour parvenir à une vision d'ensemble d'une
portion de vie de ce héro improbable. Cette forme de narration
permet d'obtenir un récit dynamique. Toutefois, c'est aussi sa
limite, puisque l'auteur en voulant rendre accessible son histoire,
la rend en même temps fragmentaire, épisodique. Au final,
ce bouquin même s'il vire vers la "SF" sur la fin, reste
un roman
noir dense, intriguant et superbement écrit.
Manu
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