Gérald Bronner, Qu'en est-il du corps de Dieu ?

Ultimes, Baleine, 2002

Un homme part brusquement à New York laissant tout derrière lui sauf son chien. Cet homme d'une beauté sidérante va dériver. Mais il se passe des choses étranges, surnaturelles.
Dans le milieu du polar empli de mécréants alcooliques, oublieux de la religion, voir libre penseurs ou anarchistes, la question " qu'en est-il du corps de dieu ?" est une question que peu se posent. De même je ne pense pas que beaucoup d'entre eux se demandent ce que signifie être un saint et en quoi le doute nourrit la foi (si j'ai tout compris). Bref un roman qui tranche avec le reste du roman noir français.

Bronner est un mystique. Et pourquoi pas.
Il sait créer un climat mystérieux, par petites touches il arrive à nous intriguer, on se demande pourquoi ces chiens se regroupent pour commettre des méfaits par exemple, seule la fin est décevante par rapport à ce que promettait le reste du récit.
En plus d'un univers, il est évident que Bronner a une écriture à lui faite de phrases courtes, exclamatives, interrogatives, un vocabulaire cru, sobre et parfois suranné.
Mais si le style est plus maîtrisé, on retrouve les défauts de son roman précédent, une pose parfois désagréable, une volonté de mettre à distance le lecteur. On a l'impression de visiter une belle architecture froide. Avec parfois une certaine complaisance : comme cette description des femmes toujours vus par le narrateur comme trou, réceptacle…, même si ce n'est pas Bronner qui parle mais son héros, on sent une volonté de faire dans le malsain, le politiquement incorrect un peu facile. Le jour où Bronner voudra moins en faire, en montrer, il pourra devenir un grand écrivain.

 

Gérald Bronner, Journal de Guerre

Baleine, 2001

Un lycéen redoublant dans une ville lambda part en guerre. Contre quoi ? Contre qui ? Nous ne savons pas trop mais nous savons que c'est la guerre de tous contre tous. Gérald Bronner décrit un univers mental fermé sur lui-même, celui d'un lycéen qui a une rage enfouie en lui, pour qui la famille est synonyme de coups, de pleurs, les relations sexuels avec les filles toujours proche du viol, un jeune qui ne pense qu'à sa bite et à son flingue (réel ou imaginaire ?) qui lui permettrait de dézinguer à tout va.

Le roman fait comme le héros, il tire dans tous les sens, en petites phrases hargneuses, explosives. Et comme ça tire dans tous les sens, ça tire un souvent juste, ça tire parfois à côté de la plaque. D'un côté, une vraie méchanceté, de belles envolées, un style rapide, parlé et poétique en même temps. De l'autre on trouve de l'esbroufe, une volonté de choquer parfois tape à l'œil, c'est presque trop écrit, trop pensé, ainsi cette volonté de ne pas faire qu'un roman noir mais aussi un récit apocalyptique avec des références religieuses ou mythologiques…, on sent le désir de se faire remarquer, c'est parfois un peu : " regardez comme j'écris ! Regardez comme je ne suis pas politiquement correct ! Etc. ", l'auteur a voulu trop en mettre.

Bref ça remue légèrement mais on reste à distance, à admirer le style. Il manque un regard. Au niveau du rythme, le livre est bien construit, même si on comprend assez vite où l'auteur veut en venir, et si parfois, on éprouve une certaine lassitude face aux délires répétitifs du narrateur. Malgré ces réserves, cela reste un livre à lire, ce n'est pas un livre fade, banal, on sent une réelle volonté de rentrer dans le tas, de s'imposer, de partir au combat et l'écriture est d'une richesse pas si courante, ce qui l'élève au-dessus de la moyenne des romans noirs.

Baptiste